Danielle Tartakowsky, professeur émérite d’histoire contemporaine à l’Université Paris 8 et spécialiste de l’histoire des mouvements sociaux a publié récemment Les syndicats en leurs murs, Bourses du Travail, maisons du peuple, maisons des syndicats (Ed Champ Vallon).
Par la force des choses ou plutôt par décision du maire de Troyes, la CGT et les organisations qui avaient leurs sièges place Jean Jaurès à la Bourse du Travail de Troyes, ont dû déguerpir il y a quelques années. Aujourd’hui des menaces planent sur le devenir de la Bourse du travail de Romilly-sur-Seine. Cet état de fait n’est pas spécifique à notre département. Dans de très nombreuses villes les municipalités s’emploient à chasser les organisations syndicales de leurs locaux historiques pour leur donner d’autres destinations. Une brasserie à Troyes !
Il est apparu comme une évidence au CEMOA et à l’association Bourse du Travail mémoire vivante d’inviter Danièle Tartakowsky pour parler de cette histoire longue et singulière en résonance avec les actions menées dans l’Aube et les recherches effectuées par nos deux associations. Nous remercions L’Upop Aube d’être partenaire de cette conférence.
Un “chez soi”, un “chez nous” : c’est ainsi que les syndicats ont voulu et conçu les Bourses du travail, Maisons du Peuple et Maisons des syndicats. Apparus en 1887, ces édifices d’initiatives municipales ou ouvrières ont connu leur plein essor dans l’entre-deux-guerres. Ils constituent un patrimoine architectural et symbolique d’une singulière originalité : une quarantaine d’entre eux sont classés monuments historiques ou inscrits à l’inventaire du patrimoine.
Cet ouvrage les restitue en majesté : à la confluence de l’histoire syndicale et municipale, de celle de l’architecture et de la ville, il analyse ces modes d’hébergement syndical en interrogeant leur origine, en retraçant les interactions entre municipalités et syndicats.
À l’heure où nombre de Bourse du travail ont été reconverties en édifices culturels, cette retraversée de cent vingt-cinq ans de luttes mais aussi de sociabilité syndicale et ouvrière à partir du prisme des bâtiments qui les ont abritées dévoile un pan oublié de l’histoire industrielle et sociale : ces “forteresses” qui magnifient la dignité du travail ont été une expression majeure de la force du syndicalisme et de sa centralité historique.